“Une grave distorsion du cadre juridique actuel et impacterait négativement un segment du marché essentiel pour la mobilité, le travail, les études et la vie sociale en Catalogne”. C’est ainsi que certaines entités réagissent face au décret qui régule les locations saisonnières et de chambres, approuvé par le Parlement catalan.
Selon le Gouvernement de la Generalitat, ce décret établit que les locations saisonnières et les locations de chambres auront le même plafond que les locations de logements permanents. De plus, la qualification de logement social sera obligatoirement prolongée dans les zones de marché résidentiel tendu tant que dure cette situation.
Face à cette mesure, Carles Sala, porte-parole des Agents de la Propriété Immobilière (API) de Catalogne, se montre, en partie, prudent et souligne qu’il sera nécessaire d’attendre le texte final de la norme et, surtout, la décision du Conseil des Garanties Statutaires, auquel cette régulation sera très probablement soumise.
"Si elle est approuvée dans les termes convenus par les groupes parlementaires promoteurs, nous serions face à une réédition de la logique contenue dans le Décret-loi 6/2024. Assimiler les contrats de location saisonnière aux locations de logements habituels, les soumettant aux mêmes limitations de loyer, même lorsqu’ils répondent à des finalités professionnelles, sanitaires, académiques ou de travail ; et changer le concept de la location saisonnière qu’offre actuellement la LAU", commente l’expert.
Interventions et erreurs conceptuelles
Pour Leonardo Cromstedt, président de Keller Williams Espagne-Andorre, cette régulation des locations saisonnières en Catalogne, bien qu’ayant de bonnes intentions, "représente une intervention significative sur le marché qui entraînera sûrement des conséquences négatives. À titre d’exemple, on peut rappeler que, depuis la mise en place des contrôles des prix des loyers en Catalogne, l’offre a chuté de 15% en moyenne, avec des baisses encore plus importantes dans certaines villes comme Gérone (-20%), ou Tarragone (-16%), et tout cela, avec un impact minime sur les prix".
Selon Cromstedt, l’intervention étatique sur les marchés tend, d’une part, à décourager l’investissement privé réduisant encore plus l’offre. Et, d’autre part, elle pousse les propriétaires qui restent dans le secteur, vers des marchés alternatifs comme les locations touristiques ou même vers la vente de leur propriété, ce qui aggrave la pénurie structurelle de logements locatifs.
Tandis que Carles Sala, de API, considère que l’assimilation des contrats de location saisonnière aux locations de logements habituels est une erreur conceptuelle: "La gestion de la location saisonnière répond à une logique différente et requiert un traitement juridique différencié. Une fois de plus, le législateur semble légiférer dos à une partie importante de la réalité sociale et économique, en ne tenant compte que d’un discours dominant, de coloration idéologique marquée".
La nouvelle loi qui régulera désormais les locations saisonnières en Catalogne marque clairement quels seront les critères pour louer dans ces conditions, "introduisant la création d’un corps d’inspecteurs de logements, chargés de vérifier le respect de cette réglementation, et de détecter les fraudes et proposer des sanctions", souligne le président de Keller Williams Espagne-Andorre.
"Douteuse sécurité juridique"
L’expert de Keller Williams mentionne que la sécurité juridique de cette initiative est très contestable. De fait, les réglementations antérieures ont été annulées par le Tribunal Constitutionnel en raison de conflits de compétences entre le gouvernement catalan et l’État. "Les mesures actuelles pourraient faire face aux mêmes conflits. Indépendamment de la conclusion de cette initiative, ce qui est clair, c’est que cette norme ajoute déjà de l’incertitude entre propriétaires et investisseurs, ce qui dissuadera l’investissement et le déplacera vers d’autres utilisations ou marchés non réglementés".
Tandis que, du côté des Api, on souligne que nous sommes face à un autre exemple de législation éphémère en matière de logement en Catalogne. Le professionnel rappelle également que plus de la moitié des normes approuvées dans ce domaine ont été partiellement ou totalement annulées par le Tribunal Constitutionnel. "La présente réglementation, dans sa formulation actuelle, semble réunir tous les éléments pour suivre le même parcours, qui part de ces normes, celle du Tribunal Constitutionnel".
"Grave impact"
Les diverses associations du secteur, comme Foment del Treball, l’Association des Promoteurs de Catalogne (APCE), l’Association des Propriétaires de Logements en Location (ASVAL), l’Association des Agents Immobiliers de Catalogne (AIC), le Collège des Administrateurs de Biens de Barcelone et Lleida (CAFBL), le Collège Officiel des Agents de la Propriété Immobilière de Barcelone (COAPI) et la Chambre de la Propriété Urbaine de Barcelone ont rédigé un écrit commun dans lequel elles expriment leur préoccupation face à l’annonce de l’extension du contrôle des loyers aux contrats de location de courte et moyenne durée.
Selon elles, "cette mesure, si elle était mise en œuvre, entraînerait une grave distorsion du cadre juridique actuel et affecterait négativement un segment du marché essentiel pour la mobilité, le travail, les études et la vie sociale en Catalogne".
Comme nous l’avons exposé auparavant, les locations temporaires – généralement régies par la Loi sur les Locations Urbaines (LAU) comme contrats d’usage autre que d’habitation – répondent à des causes objectives et des finalités très concrètes: comme par exemple loger temporairement des professionnels déplacés, des étudiants, des chercheurs, des personnes en transition résidentielle ou en mobilité internationale. "Ce type de locations, qui ne dépassent habituellement pas 12 mois de durée, ne constituent pas une alternative au logement habituel, mais un complément indispensable pour une société dynamique et ouverte".
Pour les associations, étendre le contrôle des prix à ce type de contrats supposerait une extralimitation juridique et une décision contre-productive du point de vue économique et social. L’article 17 de la LAU établit clairement que les limitations au prix du loyer ne peuvent s’appliquer qu’aux contrats de logement habituel. Et, comme l’ont commenté les experts immobiliers, leur appliquer le même traitement légal ne générerait pas seulement de l’insécurité juridique, mais compromettrait l’existence même de ce type d’offre en Catalogne.