Augusto Lobo, directeur de Capital Markets Retail chez JLL, analyse la période faste que connaît le retail dans les emplacements prime en Espagne et au Portugal.
Un essor stimulé par l’augmentation du tourisme, le retour de la consommation et un appétit renouvelé des investisseurs.
L’expert souligne que l’insécurité juridique de villes comme Barcelone n’affecte pas l’intérêt des investisseurs dans ce segment.
Ils continuent de miser sur les magasins physiques comme un pilier stratégique dans la chaîne de valeur des marques.
Il souligne également l’essor de nouveaux secteurs comme la beauté ou le sport, et les opportunités dans les zones émergentes au-delà des axes traditionnels.
- L’essor du Retail en Espagne et au Portugal
- L’Appétit Renouvelé des Investisseurs
- Les Défis Locaux : Focus sur Barcelone
- Nouvelles Zones en Vogue
- Évolution des Opérateurs et Tendances Sectorielles
- Impact de la Covid sur les Loyers
- L’Influence du Tourisme
- L’Importance des Critères ESG
- Les Tendances Futures du Retail
L’essor du Retail en Espagne et au Portugal
Comment décririez-vous la situation actuelle du retail dans les emplacements prime en Espagne et au Portugal ? Quelles sont les principales différences entre ces deux marchés ?
Nous avons assisté à une reprise spectaculaire de la consommation et au retour de l’importance des espaces physiques.
On le voit clairement dans le taux d’occupation que nous enregistrons dans les principaux axes commerciaux.
De nombreux retailers se sont transformés, et le rôle du magasin a évolué ces dernières années.
Il n’est plus seulement un point de vente, mais l’une des parties les plus importantes de toute sa chaîne logistique.
L’Appétit Renouvelé des Investisseurs
En termes d’investissement, l’appétit pour les actifs high street est-il de retour ? Quel type d’investisseurs sont les plus actifs en ce moment ?
2024 a été une année très importante en termes d’investissement dans les actifs retail en Espagne, et le premier trimestre de 2025 enregistre également de nouveaux records.
L’appétit pour ce type d’actifs est de retour, sans aucun doute.
Ces deux dernières années, l’intérêt est surtout venu du capital privé, en raison des coûts d’opportunité et des positions plus conservatrices de certains investisseurs.
Mais le capital privé s’est lancé à fond dans ce type d’actifs, presque sans concurrence.
Il est vrai que nous commençons à voir le retour de l’investisseur institutionnel, et nous prévoyons que, compte tenu de la bonne performance de l’activité, nous commencerons à voir cette année de nouveaux profils d’investissement dans le retail.
Les Défis Locaux : Focus sur Barcelone
En zoomant sur les problèmes structurels de chaque ville… Si nous nous concentrons sur Barcelone, par exemple, comment l’insécurité juridique affecte-t-elle l’investisseur ?
Dans le retail, cette insécurité n’est pas très perceptible. Il y a beaucoup de demande à Barcelone et l’investisseur n’est pas particulièrement affecté par cette insécurité juridique.
"Le retail dans les zones prime connaît une période faste, stimulée par le tourisme et la consommation"
Nouvelles Zones en Vogue
Nous savons tous quels sont les emplacements les plus demandés par les marques et les opérateurs à Madrid, Barcelone, Lisbonne et Porto.
Mais l’axe traditionnel se maintient-il ou y a-t-il de nouvelles zones en plein essor ?
Avec l’augmentation de l’occupation dans les zones les plus prime, on recherche des emplacements plus émergents.
À Madrid, nous le constatons dans le quartier de Justicia, par exemple.
Certains opérateurs veulent se concentrer sur un autre créneau de marché et ne le trouvent pas dans les axes les plus prime.
De plus, ils doivent équilibrer les chiffres entre le loyer et le trafic, et il n’est pas toujours rentable pour les petites marques d’être dans des emplacements prime.
De nouveaux emplacements émergent-ils par secteur ? À Barcelone, par exemple, la Diagonal est en train de devenir la rue préférée des magasins de décoration…
Absolument. C’est une tendance croissante dans le retail et un reflet clair du comportement que nous observons également dans les centres commerciaux.
Évolution des Opérateurs et Tendances Sectorielles
Comment la typologie d’opérateur a-t-elle évolué ces dernières années ? Quels secteurs (luxe, mode, restauration, expériences…) sont en tête de l’occupation des locaux prime ?
Ces dernières années, nous avons vu les marques de sport dominer le marché.
Nous l’avons constaté avec l’ouverture de flagships de Nike ou Adidas sur le Paseo de Gracia, par exemple.
Nous avons également constaté une forte croissance des marques spécialisées dans la beauté, avec des opérateurs tels que Primor, Druni ou Sephora en tête.
Le retail et sa croissance dans les rues reflètent les tendances.
Impact de la Covid sur les Loyers
En termes de loyers, qu’est-ce qui a changé dans le secteur depuis la covid ? Les loyers se sont-ils déjà rétablis ?
Après la pandémie et une baisse ponctuelle des loyers, des solutions contractuelles ont été trouvées, telles que des loyers variables ou des formules soumises à certaines circonstances.
Avec le temps, et grâce à la demande de locaux, nous sommes revenus à la normale. Les loyers se sont complètement rétablis.
"Les marques continuent de miser sur le magasin physique comme un élément clé de leur stratégie"
L’Influence du Tourisme
Comment l’essor du tourisme influe-t-il sur le comportement du high street ? Est-ce plus visible dans certaines villes ou zones spécifiques ?
À Barcelone, ce n’est pas quelque chose de nouveau, car la ville a toujours été très touristique et le retail a toujours beaucoup profité des visiteurs étrangers.
Le grand changement que nous avons constaté se situe à Madrid, où nous avons enregistré une augmentation du tourisme et du nombre de nouveaux résidents.
Cela génère une plus grande demande dans certaines zones de la ville.
L’Importance des Critères ESG
Quelle est l’importance des critères ESG dans les décisions d’investissement et d’occupation des locaux commerciaux dans les emplacements principaux ?
Pour l’investisseur, c’est un élément de plus en plus important.
Et si nous parlons de l’investisseur institutionnel, c’est un élément qu’il prendra en compte, quoi qu’il arrive.
Pour deux raisons : la première, parce qu’ils ont des stratégies très claires qui consistent à n’investir que dans des actifs qui répondent à certains critères.
La seconde, en raison de la composante liée au financement. Il est très différent de rechercher un financement pour conclure une opération avec un actif qui répond à ces normes qu’avec un actif qui ne les respecte pas.
Les Tendances Futures du Retail
Chez JLL, quelles tendances à moyen terme prévoyez-vous pour le retail urbain dans la péninsule ibérique ? Comment le modèle de magasin physique va-t-il évoluer ?
Le secteur des magasins est en constante évolution.
Aujourd’hui, l’essentiel est l’expérience, et tous les opérateurs se concentrent sur cet aspect.
Il s’agit d’intégrer le numérique dans l’espace physique.
Je ne parle pas seulement d’écrans, mais du fait que la stratégie en ligne est connectée à 100 % à la stratégie physique.
Par exemple, la collecte ou le retour d’une commande en ligne ne doit pas être caché dans un coin, mais faire partie intégrante de l’expérience du magasin. Cela simplifie le processus et améliore l’expérience client.
Quel message adresseriez-vous aux propriétaires et aux fonds qui hésitent encore à investir ou à réinvestir dans le retail urbain dans les emplacements prime ?
Il faut cesser de se focaliser uniquement sur les grands titres et examiner les chiffres réels.
Le retail est une activité qui s’adapte rapidement et efficacement aux situations.
Il est en constante transformation et c’est un secteur attrayant, avec une dynamique énorme.